Le numéro 9 de la revue EAV débute par une contribution de François Béguin sous-titrée " éloge des enclaves, de l'infini et de la fuite ". À partir d'un bel ensemble de citations puisées dans la littérature s'attachant à Paris, il traque les impasses, recoins, cours, passages ou porches qui témoignent des possibilités d'isolement que les profondeurs de certaines parcelles offrent. Seulement perceptible par le piéton attentif, il relate comment ces épaisseurs contribuent à fabriquer l'atmosphère de la capitale.Le dossier de la revue porte sur Marcel Breuer, architecte et designer, l'un des plus jeunes élèves du Bauhaus, né en Hongrie et mort à New York en 1981, au moment où le Vitra Museum lui consacre une grande exposition. Parmi ses réalisations les plus célèbres, on compte le Whitney Museum à New York, la station de sport d'hiver de Flaine et le siège de l'UNESCO avec Nervi et Zehrfuss. Tant, l'article de Barry Bergdoll professeur à Columbia University que la transcription de la conférence que fit l'architecte à Zurich, en 1934, révèlent combien Breuer s'intéressait à des architectures dont l'organisation comme les modes constructifs étendent leurs racines dans le temps long de l'histoire. Ensemble, ils montrent comment son travail s'appuyait sur une interprétation de types traditionnels, bref combien il était sensible à l'idée de continuité plus que de rupture, contrairement à l'image convenue des architectes du Mouvement moderne.Suivent quatre études, une est consacrée à la question de la sauvegarde de l'architecture des Trente glorieuses. Le XXe siècle aura vu un jaillissement de techniques innovantes et de nouveaux matériaux envahir la construction sans que l'on ne sache toujours évaluer leur durabilité. Les bâtiments vieillissent mal et sont d'autant plus fragiles que leur architecture est souvent méprisée, voire exécrée. Une prise de conscience récente de leur vulnérabilité, explique la soudaine mobilisation du ministère de la Culture sur " le traitement patrimonial des constructions de l'après-guerre ". La seconde traite du fameux projet d'Eugène Beaudouin et Marcel Lods pour l'école de plein air de Suresnes dont le maire n'est autre qu'Henri Sellier. La genèse du projet et le rôle du docteur Hazemann, permettent de saisir les phases d'élaboration de cette école idéale dédiée à la santé des enfants. La troisième est consacrée à la carrière américaine de l'ingénieur viennois Anton Tedesko (1903-1994) auteur de nombreux hangars géants pour l'US Army et surtout de nombreuses rampes de lancement et hangar à Cap Canaveral. La dernière aborde, à travers les exemples de Florence, Milan et Naples, un sujet, un lieu et un temps différents : l'histoire urbaine italienne au XI Xe.