Michel Layaz s’attaque au pionnier suisse de l’automobile dont le nom Chevrolet fait encore rêver les foules.
New York, 1905. La course de Morris Park se termine, la presse se rue sur le gagnant qui sort de sa Fiat. Qui est ce moustachu qui bat tous les records établis dans l'histoire encore jeune du sport automobile? Chevrolet est son nom, Louis Chevrolet. Le lecteur de 2021 hochera la tête d’un air entendu. Oui, oui, Chevrolet, bien sûr, les voitures, la croix dorée. Aucun doute, il connaît cette marque. Mais a-t-il déjà entendu parler de Louis? Bien que le nom de Chevrolet ait laissé des traces dans la mémoire collective, son porteur semble être tombé dans l’oubli. C’est sans doute cette tension entre la notoriété du nom de famille et la méconnaissance du personnage qui a incité Michel Layaz à raconter l’histoire de Louis.
Dans Les Vies de Chevrolet, treizième roman de Layaz, l’écrivain retrace le parcours du visionnaire d’origine suisse. De La-Chaux-de-Fonds à Detroit, il emmène le lecteur à travers les différentes étapes de la vie de ce pilote de course, père de famille et pionnier de l’automobile, qui – plutôt mauvais homme d’affaires – n’a jamais touché aux millions qu’a remporté la marque à son nom. Avec ce nouveau roman, Layaz retourne à la veine qu’il avait commencé à explorer en écrivant son avant-dernier livre, consacré à une autre personnalité suisse, qui porte – est-ce le fruit du hasard? – le même prénom que son héros actuel. Pour Louis Soutter, probablement, esquisse d’une vie qu’aurait pu mener le peintre romand, il avait obtenu plusieurs distinctions, dont le Prix suisse de littérature. Cette fois-ci, Layaz quitte le champ du probable pour une narration qui reste proche du curriculum connu de Chevrolet. Les événements de la vie de ce dernier se précipitent de page en page, le récit avance au tempo d’une voiture de course. De temps en temps pourtant, on s’arrête. Pour Louis, c’est l’occasion de changer un pneu de son véhicule et de reprendre son souffle. Pour Layaz, celle d’explorer la vie intérieure de son personnage, sans cesse tiraillé entre la soif de la victoire et la conscience des risques qu’elle implique pour lui et sa famille tant aimée. Les échecs et la mort constituent le revers de la médaille.
À l’heure où prédomine l’autofiction, Michel Layaz dresse avec brio le portrait sublime d’un personnage historique, qui fait réfléchir aux aléas de la vie et voyager aux temps des premières automobiles. Espérons que Les Vies de Chevrolet ne sera pas le dernier roman biographique de Layaz. L’histoire suisse connaît encore plusieurs Louis dont la vie aspire à être racontée.