La comédienne et écrivaine livre avec Poussières du Sahara un épatant nouveau recueil de chroniques. Si ses textes ciselés, tendres et piquants racontent notre quotidien sous le COVID-19, ils disent aussi la colère envers toutes les nouvelles formes de censures.
Les Poussières du Sahara de Claude-Inga Barbey, ce sont ces sables ocre, orangés, que le vent du Sud nous amène parfois et que nous retrouvons sur les pare-brise de nos voitures, sur les trottoirs certains matins. Mais l’écrivaine et comédienne transforme ces simples poussières en fabuleuse «poudre aux yeux», celle qui donne tout son pouvoir à l’imagination et nous fait croire aux histoires qui enchantent le monde et prodigue saveurs, couleurs et intensité à la réalité.
Claude-Inga Barbey habite notre paysage théâtral, radiophonique et humoristique depuis trente ans. Elle a été durant 20 ans Monique du couple mythique de Bergamote, puis la psy de l’émission radio «Betty» avec sa chère Doris Ittig, elle a incarné une fantastique infirmière Bénédicte dans la série RTS Anomalia, qui lui a d’ailleurs valu un titre du meilleur second rôle féminin à Soleure. Elle est bien sûr la femme de ménage espagnole Manuela depuis 2018, sur scène ou dans des sketches vidéos, et puis Jacqueline, son personnage de psy complètement névrosée dont l’une des vidéos lui a causé tant d’ennuis.
Tout ceci ne doit pas faire oublier à quel point Claude-Inga Barbey est une écrivaine formidable. Dès son premier livre, Petite dépression centrée sur le jardin, un recueil de récits brefs paru aux éditions d’autre part en 2000, elle impose son style à la fois acidulé, ironique, mélange de mélancolie et d’humour ravageur. Romancière, elle raconte une séparation de couple dans Les petits arrangements en 2007, ou son enfance compliquée dans un bouleversant Le palais de sucre en 2003. En chroniqueuse de l’air du temps, de nos petits et grands chagrins, de nos rituels et manies, elle excelle tout autant.
Les chroniques de Poussières du Sahara ont été écrites en partie pour le média en ligne Heidi.news durant l’année 2021. Le dernier tiers, écrit la même année, est inédit. On y retrouve une ambiance COVID-19, le masque, le gel, les nouveaux rituels qui s’instaurent. Mais l’auteure fait feu de tout bois, observe ses congénères dans les cafés, les commerces, dans leur salon ou sur les réseaux sociaux avec une tendresse amusée. D’une scène de vie avec son fils ou son petit-fils ou son ex-mari, elle tire des histoires de vie formidables et des leçons de sagesse universelles. Mêlant fiction et réalité, elle fait résonner les choses avec justesse, sans explications ou commentaires inutiles. Seule la préface lui donne l’occasion de délivrer un message, de dire avec force sa conviction de toujours et son moteur de chaque matin: résister. Par l’art, par l’humour, par l’amour, par la cigarette et, bien sûr, par l’écriture.